La Fabrique hexagonale n’a pas de passion démesurée pour les chaussettes et leur fabrication (cf. Finance et jus de chaussettes). L’article publié ce jour dans Les Echos mérite cependant que l’on s’attarde à nouveau sur la question. Que nous apprend en effet ce papier ? Que, comme déjà annoncé, le contrat qui lie actuellement Dim et Tricotage des Vosges ne sera pas renouvelé et que, en conséquence, le chiffre d’affaires de l’entreprise vosgienne va se trouver amputé des deux tiers dans les prochains mois. Pour cette PME, l’avenir s’annonce donc sombre, en particulier pour ses 250 salariés. De nouveaux emplois vont donc être supprimés parce qu’un fonds d’investissement, en l’occurrence Sun Capital Partners, le nouveau propriétaire de Dim, a exigé le doublement pur et simple des royalties pour que Tricotage des Vosges ait, à l’avenir, le privilège d’apposer les trois « lettres magiques » sur les produits qu’elle fabrique. A défaut d’accord, le contrat n’a donc pas été renouvelé et les futures chaussettes Dim seront désormais « fabriquées » par Kindy, non plus en France, mais en Roumanie. « On va quand même pas se laisser tondre la laine sur le dos pour préserver quelques minables emplois d’ouvriers ! Egoïstes ! » « Salauds d’pauvres ! », aurait certainement ajouté Jean Gabin…

Comptable ou chef d’entreprise ?
Seulement voici : le patron de Tricotage des Vosges, M. Jacques Marie – jadis lui-même à la tête de Dim –, n’entend pas sacrifier ses salariés pour autant. En bon chef d’entreprise – et non pas en simple comptable ou financier –, il préfère chercher de nouvelles idées, repositionner sa propre marque, BleuForêt, pour la rendre plus abordable et s’implanter ainsi en grandes surfaces, à côté de Dim… Malgré l’accord de nombre de grandes enseignes en ce sens, le manque à gagner provoqué par la perte de la licence Dim demeure important. « Mon chiffre d’affaires va être ramené à 16 millions (au lieu de 21,7 avec la licence Dim) pour le prochain exercice, mais nous resterons à l’équilibre… », explique Jacques Marie. Avant de préciser que, l’entreprise n’étant pas endettée, il espère retrouver le niveau actuel d’activité dans trois ans. Entre-temps, tous les emplois de Tricotage des Vosges auront, normalement, été préservés.
Alors, la prochaine fois qu’une disgracieuse « patate » ornera un de vos pieds, probablement au niveau du gros orteil, et que vous vous rendrez au supermarché pour acheter de nouvelles de chaussettes, posez-vous cette question : Est-ce que je préfère acquérir cette ridicule paire de Dim, fabriquée en Roumanie, et cautionner ainsi l’attitude détestable de Sun Capital Partners, ou n’est-il pas préférable, voire infiniment plus moral, d’acheter ceux deux magnifiques fourreaux de laine BleuForêt, même un peu plus cher, et de remercier ainsi Jacques Marie d’avoir permis à quelques dizaines d’ouvriers de conserver leur travail ?