En ce 1er juin 2009, lundi de Pentecôte, plusieurs événements ont révélé l’état de déliquescence avancée du modèle de société qui est le nôtre depuis plus d’un demi-siècle.
L’ex numéro un mondial de l’automobile, icône de la puissance économique américaine, a ainsi déposé le bilan. General Motors est désormais une entreprise nationalisée, qui va devoir subir une restructuration radicale pour survivre. La fermeture de quatorze sites de production est ainsi évoquée. Après la déconfiture des banques états-uniennes, voici la fin de l’automobile américaine, ou presque. Banques d’affaires rayées de la carte, GM nationalisée, Chrysler passée sous contrôle italien, autant de symboles du rêve américain et de son idéal qui font désormais partie du passé.
Et en France ? Il y a quelques années déjà, la mise en place de la « journée de solidarité » du lundi de Pentecôte marquait la première augmentation de la durée du temps de travail de l’histoire : un jour supplémentaire travaillé gratuitement ! Cette année, le 1er juin a été marqué par la création par La Fondation Abbé Pierre d’une plate-forme téléphonique destinée à venir en aide à tous les locataires menacés d’expulsion. Depuis dix ans, les expulsions locatives auraient en effet augmenté de 150%. Selon la fondation, qui cite des chiffres du ministère de la Justice, « 1,8 million de ménages peinent aujourd’hui à s’acquitter de leur loyer.(…)  Parmi eux, 500 000 sont en situation d’impayés et plus de 100 000 ménages voient ainsi leur bail résilié chaque année ». Il y a un an à peine, la presse nationale dans son ensemble multipliait encore les Une sur « le boom de l’immobilier », sur l’accession à la propriété, sur « le moment d’acheter », sur « le rêve de chacun de devenir propriétaire », etc. C’est cette folie immobilière qui est à l’origine de la banqueroute généralisée d’aujourd’hui. C’est à cause d’elle que des centaines de milliers de familles risquent demain de se retrouver sans toit, parce qu’ils ont perdu leur emploi, mais aussi parce que des milliers de propriétaires ont acheté à des prix insensés, sans en avoir les moyens, et qu’ils ne peuvent rembourser leurs banques si leurs locataires font défaut.
Et quand bien même ces locataires auraient-ils conservé leur emploi, combien parmi eux ne gagnent-ils pas assez pour pouvoir manger, se soigner et payer leur loyer ? Car si d’un côté les chiffres du chômage grimpent en flèche, de l’autre ceux des travailleurs pauvres suit la même courbe. A tel point que, en ce lundi 1er juin 2009, le gouvernement français a officiellement mis en place le RSA, qui remplace de fait le RMI. Il y a vingt et un ans, le gouvernement Rocard créait le Revenu minimum d’insertion pour garantir un minimum vital à tous les « privés d’emploi ». Il devait aussi leur permettre de se réinsérer. En 2009, le Revenu de solidarité active est censé compléter les revenus des travailleurs qui ne gagnent pas assez pour vivre décemment.
Depuis les années quatre-vingt, on sait que, bien que vivant dans l’un des pays les plus riches du monde, on n’est pas assuré d’avoir d’un emploi. Depuis les années quatre-vingt-dix, on sait également qu’il ne suffit plus d’être diplômé pour décrocher ce même un travail.
Depuis le 1er juin 2009, on sait maintenant que même en travaillant, on peut vivre dans la pauvreté. Avec le RSA, un gouvernement libéral reconnaît officiellement la faillite, pour l’immense majorité de la population, d’une vision du monde et de l’économie.
Mais si l’on continue malgré tout de suivre demain le même chemin, que faudra-t-il faire alors pour gagner sa vie, se loger, se soigner et élever ses enfants ?