© S. Petit/La Fabrique hexagonale

© S. Petit / La Fabrique hexagonale

Les produits chinois sont de mauvaise qualitĂ©, peu fiables, parfois mĂªme dangereux. Les Ă©tudes sont lĂ©gions qui vont en ce sens. Soit.
Rappelons tout de mĂªme que plus de la moitiĂ© de ces marchandises exotiques sont des produits de marques occidentales, françaises notamment, fabriquĂ©es en Chine puis importĂ©es ici.
Dans l’esprit du consommateur cependant, ce sont les vraies « chinoiseries » qui sont stigmatisĂ©es, celles qui sont censĂ©es Ăªtre produites dans des conditions sociales et humaines exĂ©crables. Les produits des marques françaises, italiennes, japonaises ou autres sont bien Ă©videmment fabriquĂ©s dans des conditions incomparablement meilleures. Pour simplifier, le made in China est acceptĂ© si ce sont des marques bien de chez nous qui le commercialisent. Mais s’il s’agit de marques chinoises, c’est autre chose. Et puis dĂ©noncer la Chine, ça permet Ă  certains de valoriser l’Europe de l’Est et le Maghreb, des zones que les industriels d’Europe de l’Ouest ont « colonisĂ©es » pour produire Ă  bas coĂ»t tout en dĂ©nonçant les dĂ©localisations en Asie. Pratique.

Arroseurs arrosés

Cela rappelle les premières heures d’Airbus. A cette Ă©poque, les autoritĂ©s amĂ©ricaines accusaient les gilets de sauvetage des appareils europĂ©ens de provoquer allergies et brĂ»lures. Et bien sĂ»r, nous trouvions cela injuste et ridicule, de ce cĂ´tĂ©-ci de l’Atlantique. Finalement, ces accusations n’ont pas empĂªchĂ© Airbus de grandir, d’Ă©galer puis de dĂ©passer ses concurrents d’Outre-Atlantique.
L’une des consĂ©quences des attaques et des dĂ©nonciations rĂ©pĂ©tĂ©es est que les fabricants chinois amĂ©liorent rĂ©gulièrement la qualitĂ© de leurs productions. LĂ  aussi, cela nous projette quelques dizaines d’annĂ©es en arrière, lorsque les produits japonais n’Ă©taient censĂ©s Ăªtre que pacotille et pĂ¢les copies. Ils sont aujourd’hui unanimement rĂ©putĂ©s pour leur technologie, leur qualitĂ©, leur fiabilitĂ©. Idem pour ce qui vient dĂ©sormais de CorĂ©e du Sud, voire de Taiwan. Au bout du compte, les Chinois se prennent au jeu de la critique et pointent Ă  leur tour les produits de grandes marques françaises, italiennes ou allemandes, qui prĂ©senteraient de graves dĂ©fauts de qualitĂ©. L’arroseur arrosé… Et si, après avoir conquis les marchĂ©s d’Occident, grĂ¢ce aux chevaux de Troie que sont les entreprises europĂ©ennes et amĂ©ricaines, les industriels chinois Ă©vinçaient de chez eux les malheureux Occidentaux ?
DĂ©sormais, les Chinois possèdent les usines vastes et flambant neuves, les technologies, les savoir-faire, le marchĂ©, la main-d’Å“uvre et l’argent. Ils sont depuis toujours de bien meilleurs commerçants que nous. Que nous reste-t-il ? Le luxe, les grandes marques, le design, le prestige ? La suffisance aussi. Les marques de luxe apparaissent Ă  Hong-Kong, Ă  Shanghai et ailleurs, dans ce pays d’1,5 milliard d’habitants. Hermès va d’ailleurs y lancer sa propre griffe, intĂ©gralement chinoise, grĂ¢ce Ă  une main-d’Å“uvre abondante et qualifiĂ©e, Ă  des brodeuses hors pair, Ă  des matières premières, comme la soie ou le cachemire, que l’on ne trouve pas ou peu hors de Chine, etc. Et pour ce qui est de la crĂ©ativitĂ© et du design, il suffit de prendre en exemple Chou-Chou Chic, une marque chinoise de vĂªtements pour enfants, qui affiche fièrement un esprit et un design français tout en revendiquant sa fabrication chinoise. Combien, parmi les principaux acteurs de la mode enfantine française, affichent encore le ou les pays de fabrication de leurs produits ? En auraient-ils honte ?

Faux problème

Sans cesse dĂ©noncer la pseudo piètre qualitĂ© des produits chinois est vain, mĂªme si les problèmes de sĂ©curitĂ© sont parfois rĂ©els et qu’en informer les consommateurs est la moindre des choses. Cela est vain, car nous n’avons souvent plus le choix, cela, une fois encore, grĂ¢ce Ă  la très active collaboration des industriels dĂ©localisateurs de France, d’Italie, d’Allemagne, des Etats-Unis ou d’ailleurs. Les tennis ou baskets made in China provoquent des brĂ»lures ? D’accord. Que peut-on faire ? Attendre que les Chinois rĂ©solvent le problème ou cesser d’acheter ce genres de chaussures ? Parce que s’il fallait compter sur les fabricants français et europĂ©ens, il n’y en a plus…
En France et ailleurs, le problème n’est pas tant la fiabilitĂ© des marchandises made in China, que le fait qu’elles ont quasiment rayĂ© de la carte leurs homologues françaises. Et avec elles nombre de savoir-faire. Les Chinois n’y sont pour rien. Ils convoitent la place au soleil que nous nous pensions rĂ©servĂ©e. Les politiques et les industriels des pays ouest-europĂ©ens y sont en revanche pour beaucoup.