Nous n’avons plus le choix. Comment payer 100 un salarié français quand son homologue est-européen ou nord-africain est payé 20, voire 10 ou 5 s’il est asiatique ? Impossible. Si salaires et charges baissent, quelques entreprises, les moins exposées, pourront peut-être rester en France. Si rien n’est fait en ce sens, elles n’auront d’autre choix que de partir, au Sud, ou à l’Est, c’est selon. Il faut être compétitif ou bien mourir. Ce n’est pas de gaieté de cœur si les managers, après avoir épuisé tous les recours possibles, doivent se résoudre à envoyer leur lettre de licenciement à leurs salariés. Ils ne sont plus maîtres du jeu. La pression à la baisse sur les salaires est trop forte. Seule alternative : délocaliser ou voir mourir les entreprises. Heureusement, en sacrifiant quelques dizaines, centaines ou milliers d’emplois, ce sont tellement plus qui sont préservés !

Payer ou mourir !
Ici, même logique, même concurrence effrénée, même pression sur les salaires… Comment payer 20 000 un trader français quand son homologue britannique est payé 50 000, voire 100 000 s’il est américain. Impossible. Si salaire et bonus augmentent, quelques rares as de la finance resteront peut-être à Paris. Si rien n’est fait en ce sens, ils devront se résoudre à partir Outre-Manche, ou en Amérique. Idem à la tête de nos multinationales. Pas le choix. Il faut être compétitif ou bien mourir. Ce n’est pas de gaieté de cœur si les managers, après avoir épuisé tous les recours possibles, doivent finalement se résoudre à signer leur chèque aux croisés de la finance. Sans oublier de signer le leur, au passage. Ils ne sont plus maîtres du jeu, la pression à la hausse sur les salaires est trop forte. Seule alternative : payer ou voir fuir les cerveaux. Heureusement, en sacrifiant quelques dizaines, quelques centaines de milliards d’euros, ce sont tellement plus qui seront engrangés !
Ah bon ! Et par qui ?
Hier, soldats prussiens ou autrichiens combattaient dans les rangs de l’armée française contre leur pays d’origine — et réciproquement — parce que la solde y était meilleure. Aujourd’hui, les meilleurs élèves des meilleures écoles françaises gagnent leur pitance dans les bureaux de banques britanniques ou de multinationales américaines, parfois pour démanteler des entreprises hexagonales. Autre époque, autres mœurs… Mêmes hommes. Seuls les dangers encourus ont changé. Ils ne risquent plus de prendre une balle ou de coup d’épée. Non. Aujourd’hui, ils ne risquent plus rien… Pour attirer ces mercenaires en fauteuil à roulettes, ou pour retenir les nôtres, pas d’autre choix que de s’aligner sur ce qui se fait ailleurs.

Bon vent
La finance internationale est-elle à ce point florissante qu’il faille aujourd’hui encore cracher au bassinet pour retenir ceux qui nous ont déjà fait perdre tant ? On se souvient pourtant de ces traders qui, récemment, découvraient les joies du chômage et du temps libre à volonté. Dans des conditions pour le moins enviables, il est vrai… Le moment n’est-il pas bien choisi de calmer l’appétit des plus voraces ?
Que nenni !, nous répond-on. La crise est bel et bien finie, et si la France est seule à taper sur les doigts de ses enfants gâtés, ils iront rejoindre les rangs d’une quelconque « armée ennemie ». Et ça, ça serait pis que tout. Ça serait la banqueroute assurée, un chômage digne de l’Espagne, une inflation à deux chiffres, des magasins vides comme à Moscou sous Brejnev ! Non, non, franchement, sans ses traders et ses top managers, la France n’est plus rien !
Et pourtant, si on essayait ? Si on décidait de mettre un terme au racket permanent de la finance. Si on « les » laissait mettre leur menace à exécution. Si on les regardait tous partir au loin, voguer vers des cieux bénis où les gains n’ont pas de limite, où la fortune est la valeur suprême.
Nous, les gagne-petit, les bras cassés, les losers, serions-nous vraiment plus malheureux ? Et la France, s’en porterait-elle vraiment plus mal ?