Hier encore, Renault était une entreprise publique, qui fabriquait en France des véhicules populaires, souvent novateurs. Les 4 L, R 16 — première voiture équipée d’un hayon —, Espace — premier monospace européen —, et autres Twingo ont été en leur temps les premiers de leur genre, copiés ensuite par la concurrence. L’entreprise innovait également en compétition : premier constructeur à mettre un turbo dans un moteur de F1 — interdit ensuite —, premier à essayer le V10, toujours en Formule 1. Là aussi, les autres constructeurs imitèrent Renault…
Aujourd’hui, Renault est une multinationale privée, détenue en grande partie par des capitaux étrangers, qui fabrique plus de la moitié de ses modèles hors de France. Une entreprise qui privilégie les  centres de production les plus rentables, autrement dit ceux où la main d’œuvre est la moins chère. Les sites historiques français doivent désormais se contenter de broutilles : la production de quelques Clio 2 Campus rapatriée à Flins pour épauler le site slovène, quelques Clio GPL destinées à l’Italie et transformées à Dieppe, en remplacement de l’assemblage de la Megane RS, transférée en Espagne, comme la production de l’ensemble de la gamme Mégane. Renault gagne à présent de l’argent en produisant des Dacia, des voitures low-cost fabriquées en Roumanie à partir d’anciennes technologies depuis longtemps fiabilisées.
Le statut de Renault a également changé en Formule 1, passant de celui de précurseur à celui de tricheur, contraint de provoquer des accidents pour favoriser ses pilotes et pour gagner, coûte que coûte…
On le voit, Renault est en quelques années seulement passée du statut d’entreprise d’Etat sclérosée, improductive, incapable d’innovations et d’imagination, écrasée par la tutelle étatique, étranglée par la mainmise des syndicats, à celui de groupe innovant, entreprenant, enfin libérée de ses entraves, à même de conquérir le monde… Quelques salariés « fragiles » ont mal supporté ces changements de paradigmes et ont préféré mettre fin à leurs jours. Quelques milliers d’autres ont été remerciés…
A cet égard cependant, l’ex régie est dominée de la tête et des épaules par une autre ex entreprise privée, en l’occurrence France Télécom. Plus de 20 000 suppressions de postes — soit 17% des effectifs —, les centres d’appels délocalisés et vingt-trois suicides en dix-huit mois. Un simple effet « de mode », selon le patron de l’ex opérateur national. La libéralisation du marché des télécoms devait permettre une meilleure compétitivité, de meilleurs services, des prix plus bas… Aujourd’hui, l’abonnement mensuel France Télécom est à 16 euros, ses forfaits mobile sont parmi les plus élévés d’Europe — égalés par ceux de Bouygues et de SFR et seulement dépassés par ceux proposés par les opérateurs espagnols —, les renseignements téléphoniques sont à présent payants, etc.
Là aussi, nous sommes en quelques années passés d’un mastodonte étatique à un groupe allégé et compétitif, où il fait bon travailler, dont on est heureux d’être client…
On attend à présent avec impatience les premiers résultats du changement de statut chez Gaz de France. Puis viendra demain la métamorphose annoncée de La Poste, puis celles de la SNCF, de la RATP, etc.
Que de miracles en pespective…
Nous n’avons pas fini d’être émerveillés.