Le fabrication française est à nouveau à la mode. Tant mieux. Lorsque que la première version de La Fabrique hexagonale a été mise en ligne, en juillet 2008, l’idée prêtait pourtant à sourire, au mieux… Depuis, les sites consacrés aux entreprises qui fabriquent en France se sont multipliés, certains s’inspirant très largement — et sans trop de scrupules — de l’esprit et du contenu de La Fabrique hexagonale. Les médias se sont depuis emparé de la question, les consommateurs également, sans oublier les pouvoirs publics.
La mission Jégo consacré au made in France a ainsi remis son rapport à l’Elysée le 5 mai dernier. Cette énième tentative de réglementation a-t-elle plus de chances d’aboutir que les précédentes, nationale ou européenne, qui sont toutes restées lettres mortes ?
Première constatation, les industriels consultés par M. Jégo sont pour l’essentiel ceux — Atol, Geneviève Lethu, Armor-lux… — dont on parle systématiquement quand il est question de fabrication française ou de relocalisation. Sont-ils pour autant les plus vertueux ? Si Atol rapatrie une partie de sa fabrication en France, l’essentiel reste en Asie. De même, avant de relocaliser sa production, il a bien fallu que Genevieve Lethu délocalise préalablement. Quant aux produits Armor-lux, ils sont en majorité produits ailleurs, sans que l’on puisse savoir où, faute d’étiquette. Pour expliquer cela, le très médiatisé patron d’Armor-lux explique que ses concurrents avaient avant lui cessé d’indiquer le pays d’origine de leurs produits. Il suffit d’ausculter les pulls marins ou les marinières de ces mêmes concurrents pour s’apercevoir que c’est faux. Officiellement, l’entreprise bretonne produit encore en France (à Quimper et à Troyes) environ 40 % de ce qu’elle vend. C’est la raison pour laquelle elle est encore référencée sur La Fabrique hexagonale. Lors de son entretien avec M. Jégo, le dirigeant explique qu’« Armor-lux possède désormais une renommée suffisante qui lui permettrait, sans risques particuliers, un marquage made in Marocco ou made in India. » A-t-il raison d’en être aussi sûr ? Cela a au moins le mérite d’être clair : ce qui compte désormais, ce n’est plus la prétendue fabrication française d’Armor-lux, qui a pourtant très largement participé à sa « renommée », mais son image de marque. Le savoir-faire a cédé la place au marketing.
Pour ou contre une nouvelle législation ?
Parmi les professionnels reçus par le député Jégo, une délégation de l’Union des Industries Textiles (UIT)… Une de ses représentante se plaint d’avoir parfois « à contacter les douanes qui bloquent une marchandise étiquetée made in France revenant du Maroc ou de Tunisie, alors qu’elle n’y a subi que des opérations de confection non substantielles »… Et d’expliquer que si de tels produits partent pour le Maghreb, c’est parce qu’il n’existe plus de filière de fabrication en France ! Et pour quelles raisons n’existe-t-il plus de filière en France ? Une représentante du Syndicat textile de l’Est précise heureusement que, dans sa région, une filière complète existe encore, car les industriels ont peu délocalisé… Les entreprises textiles de l’Est ne semblent pas rencontrer de problèmes particuliers avec les douaniers. Egalement convié pour évoquer cette refonte éventuelle du made in France : le Medef. Pour un de ses représentants, « l’origine ne doit pas être considérée comme un critère de choix « essentiel » pour les consommateurs, qui font confiance en premier lieu à une marque ». Il précise qu’une « démarche réglementaire quant à l’étiquetage du pays d’origine n’aurait de sens que dans un cadre européen ». Toujours la même antienne. Il rappelle également, histoire d’annoncer la couleur, «que le Medef avait consulté ses adhérents en 2004 sur l’opportunité d’une évolution du made in France et, qu’à cette occasion, la majorité des fédérations professionnelles s’étaient déclarées opposées au marquage d’origine obligatoire des produits.» Idem du côté de la Fédération de la Couture, selon laquelle le«monde du luxe ne se déclare pas favorable à l’établissement d’une obligation de marquage d’origine ».
Cette position, les syndicats (CFE-CGC, FO et CFDT), des industriels comme le gérant de l’entreprise La Forge de Laguiole — dont la production est française à 95 % — ou les représentants du Groupement de la Façon française (GFF) ne la partagent pas. Le GFF est ainsi favorable à « l’extension du régime d’obligation de marquage… ». Cette organisation estime « qu’une telle mesure aura un impact très positif sur l’emploi dans le secteur qu’il représente ».
Finalement, qu’un label made in France facultatif ait, comme le préconise M. Jégo, une, deux ou trois étoiles et que les produits soient à l’avenir accompagnés d’une carte d’identité importe peu. La question est de savoir si les principaux industriels français ont envie que l’on sache où leurs produits sont fabriqués. Et si ce sont eux ou les petites entreprises, les donneurs d’ordres ou les sous-traitants qui auront gain de cause.
Bonjour,
J’ai acheté en Australie un petit « lézard » en tissu, il est spécifié sur l’étiquette que le produit a été cousu en Thaïlande, rempli de sable et terminé en Australie.
Belle traçabilité pour un produit à quelques dollars.
J’ai entendu dire que c’est la France qui s’opposait systématiquement à tout projet d’étiquetage auprès de la commission Européenne afin de ne pas pénaliser ses grosses entreprises du luxe ?
Par ailleurs en tant que fabricant de produits « made in France » il est très difficile de faire du 100% Français.
Pour mon domaine (bijoux fantaisie) à moins de fabriquer des bijoux en bois sculpté il est pratiquement impossible d’échapper aux matériaux « made in China ».
Bonsoir,
Est-ce bien vous que j’ai vu dans envoyé spécial ce soir ? J’ai cru reconnaitre le site dans le peu d’image qu’ils ont montré. 😉
Concernant le marquage « Fabriqué en France » il ne devrait être possible que sur ce qui est à 100% fabriqué en France. et la motion « France » pareil. Et pas obligatoire, on serait vite fixé entre ceux qui prétendent et ceux qui sont honnêtes.
Que cache le « made in france » ?
Combien de % de fabrication dans l’hexagone ?
Si ce n’est qu’une infime partie pour pouvoir accoler cette étiquette à des produits qui font l’aller/retour dans des pays où le respect du travailleur n’y est pas, les normes sanitaires et les utilisations de produits pas les mêmes, est-ce donc la peine ?
D’autant plus que l’empreinte écologique est forte.
Merci pour cet article, petit rappel : le citoyen a du pouvoir, celui d’acheter ou non, faut-il encore qu’il aie la bonne information !
Bonjour,
Question :
-pourquoi les étiquettes des produits alimentaires au nom d’enseignes d’hypermarchés n’en précisent-ils jamais l’origine géographique ?
Pas obligatoire ?
Merci de votre réponse
Il est pourtant évident que le prix n’est pas tout; si on ne sait pas l’origine de ce que l’on mange, le risque est réel de consommer des produits ne répondant pas aux normes françaises, émanant de pays pollués (Chine) ou peu regardants sur les normes sanitaires (nombreux!).
Bonjour,
Mr Jégo croit ce qu’il veut. Personnellement mes choix seront toujours dictés par une morale solidaire et écologique.
Plusieurs fois j’ai préféré d’autres marques car justement ses étiquettes manquaient de lisibilités. je pense qu’il faut assumer ses choix. Je suis même parti prenant pour ne pas acheter des produits relocalisés en totalité pour des raisons éthiques.
Si une entreprise veut localiser une production à l’étranger pour s’implanter,
pourquoi pas?
Mais le fait de plier bagages, est pour moi une mauvaise stratégie, qui à terme lui coûtera cher.
Je suis très dessus par ce que j’apprend sur Armor-Lux… Ils tombent dans le travers des autres marques: prendre les consommateurs pour ânes. La marque a acquis une renommée, ils peuvent désormais délocaliser. C’est suicidaire de la part du management. Il détruit ce qui a fait le succès de la marque: d’authentique vêtement bretons faits en Bretagne. C’est pour cela qu’ont était prêt à acheter un chandail à 30 euros. Si maintenant, il est fait en Inde, je l’achète chez H&M pour 7 euros. Ils nous prennent vraiment pour des c… Tant pis, on achètera St James.
Ne pourrait-on donner gain de cause au consommateur ?
Contrairement à ce que croit ou voudrait croire un des représentants précités, le consommateur n’a plus confiance aux marques. Et l’origine est un vrai critère de choix pour une part de plus en plus importante des consommateurs.
Personnellement, j’achète des produits aussi bien made in France que made in RPC, mais quand ce n’est pas écrit, je n’achète pas et je le dis. Je suis pour l’extension du régime d’obligation de marquage et je veux pouvoir y voir tous les pays de transformations, même non substantielles.
Ces derniers temps, j’ai noté qu’il y a moins d’enseignes qui renseignent sur l’origine, même des enseignes qui le faisaient pour tous leurs produits.
Merci pour cet article.
Si le « Made in France » devenait obligatoire, gageons que les grands groupes édictent « leur » norme. Les petites entreprises qui n’ont rien à cacher, n’auront pas le droit de parole …. malheureusement…
Merci pour cet article!