© Citroën/ Astuce Productions

L’Ami One Concept est — presque — un cube de 1,5 m de hauteur et de largeur sur 2,5 m de longueur. C’est aussi la vision du véhicule urbain de demain que Citroën a présenté le 19 février dernier. Plus petite qu’une Smart, l’Ami One Concept est une deux-places qui se conduit sans permis dès 14 ans. Sa vitesse maximale est bridée à 45 km/h, son autonomie est de 100 kilomètres tandis que le temps de recharge de sa batterie est de deux heures. Originale avec ses deux portières inversées — ouverture antagoniste côté conducteur, classique côté passager —, et ses pièces rigoureusement symétriques à gauche et à droite et devant et derrière, l’Ami One est colorée, élégante et pratique. Vision futuriste de l’automobile, elle est aussi un hommage à l’histoire de Citroën, faite d’innovations, d’audace et de simplicité. Le nom même de ce concept-car est une référence à ce passé, en l’occurrence aux Ami 6 et Ami 8, véhicules populaires, simples et dépouillés fabriqués de 1960 à 1978. Citroën n’a pas non plus oublié sa légendaire 2 CV, summum du dépouillement automobile, dont l’Ami One Concept reprend le toit en toile repliable manuellement. A ces éléments d’autrefois, Citroën ajoute les nouvelles technologies, la connectivité, un look séduisant, le partage et le respect de l’environnement. Ces arguments suffiront-ils à convaincre les adeptes de la voiture en ville ? Pas sûr. Et pourtant, ce concept-car correspond parfaitement aux conditions réelles d’utilisation urbaine de l’automobile.

© Citroën/Astuce Productions

Par exemple, 80% des automobilistes parisiens circulent seuls dans leur voiture. Seulement 7% viennent de grande couronne. Par conséquent, plus de 90 % ne circulent que dans la capitale ou entre celle-ci et la petite couronne. Parmi eux, 42% parcourent moins de 10 km ; 12% moins de 5. Certes. Et les professionnels, qui ont un besoin impératif de leur véhicule, notamment pour transporter des objets lourds ou encombrants ? Ils sont très largement minoritaires, puisque les inconditionnels de la voiture sont à 80 % des particuliers. Bref, si en dépit de tous les transports en commun disponibles, des nouveaux modes de déplacement en libre service — scooters électriques, vélos, patinettes elles aussi électriques —, des bicyclettes individuelles et, bien sûr, de la marche à pied, si malgré cette offre exceptionnellement abondante certains préfèrent toujours la voiture, c’est par choix. Ils privilégient en effet leur confort personnel, quand bien même celui-ci se ferait au détriment de la santé de tous les autres. Et à Paris, plus de la moitié des habitants ne possèdent pas de voiture. De nombreuses municipalités à travers le monde ont mis en place des péages à l’entrée des villes pour dissuader l’utilisation de la voiture individuelle. Las : 64 % des acharnés de l’automobile en ville appartiennent aux classes CSP+. Beaucoup parmi eux préfèrent payer plutôt que de prendre les transports en commun. L’auto-partage n’est pas non plus une option, car pour ces hommes et ces femmes, il est impensable de partager avec d’autres son moyen de locomotion. Certes il y a la sympathique Twizy, ce petit véhicule électrique à deux places commercialisé depuis plusieurs années par Renault. Trop spartiate, pas assez confortable ni valorisant, la Twizy n’intéresse pas lesdites CSP+. Il existe aussi la Smart Electric, plus flatteuse, plus « voiture » que la Renault. Et après tout, c’est quant même une toute petite Mercedes… Mais elle aussi se faire rare dans les rues des cités.

La circulation automobile en ville génère bouchons, agressivité, bruit, pollution, accidents et maladies respiratoires. Que du bonheur…

Alors que faire pour bannir ces tonnes de ferrailles aux trois quarts vides qui congestionnent les centres-villes, agressent les oreilles et les nerfs des habitants, quand ils ne réduisent pas leur espérance de vie ou celle de leurs proches par la population qu’ils génèrent ou les accidents qu’ils provoquent ? Les transports en commun, aussi modernes, confortables et sûrs soient-ils, n’intéresseront jamais une certaine tranche de la population. En revanche, des véhicules individuels peu encombrants, silencieux et non polluants, s’ils sont valorisants, voire flatteurs pour leurs propriétaires, auraient peut-être l’heur de leur plaire. Les concepteurs de l’Ami One l’ont bien compris. Un handicap subsiste cependant : leur « bébé » restera toujours une modeste Citroën.