Les fabricants d'articles de maroquinerie multiplient les ouvertures d'ateliers et les embauches.
La maroquinerie de luxe se porte toujours aussi bien en France… © Pixabay

Quelques informations récentes mettent en lumière la diversité et le dynamisme de l’industrie française. Parler de renaissance est sans doute prématuré et exagéré, mais au moins ne s’agit-il plus de délocalisation ni de désindustrialisation.


Heureux comme un sac en France…

La maroquinerie est un secteur qui est toujours ou presque resté dynamique dans l’Hexagone, même quand tout allait mal ailleurs. Alors que ce sont très fréquemment les géants du luxe LVMH et Hermès qui inaugurent de nouveaux ateliers, ce sont cette fois des sous-traitants qui s’agrandissent pour faire face à la demande.
Le premier, Sofoma, va ainsi recruter 180 personnes pour les Ateliers du Meygal, en Haute-Loire. Fondée en 1989, Sofoma ne comptait encore que 140 salariés en 2010. Dix ans plus tard, l’entreprise emploiera bientôt 900 personnes. Spécialiste de cuir haut de gamme et luxe, Sofoma travaille notamment pour l’omniprésent LVMH qui, en effet, recourt également à la sous-traitance. Deuxième maroquinier à « s’épanouir », Algo vient à peine d’inaugurer un nouvel atelier qu’il planifie déjà une nouvelle extension. Cette PME familiale, créée en 2001, qui fabrique sacs et malles pour le compte de la très ancienne maison parisienne Goyard, a récemment ouvert un nouveau site de production à Albon, dans la Drôme. À terme, 300 personnes devraient y être employées. Algo envisage à présent de s’implanter à Châteauneuf-sur-Isère, toujours dans la Drôme, pour y établir une nouvelle usine de 12 000 m2. Ce sont cette fois 600 personnes qui seront recrutées, en deux phases toutefois.

OVH et 2CRSI : serveurs informatiques made in France.
La construction de Data Centers et de serveurs sont des secteurs d’activité pour lesquels les entreprises françaises sont très performantes… © Pexels


Serveurs made in France

Si l’Hexagone est réputé pour ses maisons de luxe, il l’est beaucoup moins pour ses champions informatiques. Pour autant, des acteurs encore modestes se développent, se fortifient et, ce qui n’est pas si fréquent, collaborent entre eux. On connaît OVH, leader tricolore et européen de l’hébergement Internet et du cloud. L’entreprise nordiste n’a pas pour seule originalité d’être le seul acteur majeur qui ne soit ni américain ni chinois. Il a aussi pour particularité de fabriquer lui-même ses serveurs, alors qu’Amazon, Google, Microsoft, Alibaba ou Tencent font appel à des sous-traitants, taïwanais en général. C’est à Croix, près de Roubaix, que ces serveurs sont développés et fabriqués. Plus de 500 personnes participent à la production industrielle des serveurs informatiques d’OVH. Dernier signe distinctif de l’entreprise : ses serveurs made in France ne sont pas refroidis avec de l’air, mais avec de l’eau. Grâce à ce procédé, OVH fait des économies substantielles de climatisation et d’électricité. Grâce au nouveau site de production de Croix, OVH produira à terme 400 000 serveurs chaque année.
Plus petit que son rival du Nord, l’Alsacien 2CRSI n’en connaît pas moins une jolie croissance. Contrairement à OVH, 2CRSI est exclusivement fabricant de serveurs. La petite entreprise, réputée pour ses serveurs hautes performances made in France, vient de remporter un contrat de 25 millions d’euros. Il s’agit de fournir des « machines » à Blade, une autre entreprise française en devenir et client de longue date de 2CRSI.

Grâce au boîtier Shadow Ghost de Blade, n'importe quel écran se transforme en PC ultra performant.
Spécialiste du jeu vidéo en ligne, le Français Blade veut faire de sa technologie de PC virtuel l’ordinateur de demain. Ci-dessus, le boîtier Shadow Ghost © Blade


L’ordinateur de futur ?

Spécialiste du jeu en ligne et créateur de Shadow, un PC virtuel, Blade est devenu un acteur majeur du gaming. Grâce à Shadow, il suffit en effet d’une excellente connexion Internet et d’un écran de smartphone, de tablette ou d’ordinateur, pour accéder à un PC virtuel ultra-performant de dernière génération. Plus besoin de logiciels ni de mises à jour, de protection contre les attaques ou les virus, plus besoin d’unité centrale. Blade et Shadow se chargent de tout. Il suffit pour en bénéficier de souscrire à un des abonnements mensuels proposés par l’entreprise française. Selon Blade, Shadow est ni plus ni moins que l’ordinateur de demain. L’activité de Blade reposant sur la vitesse de connexion et sur la qualité, la disponibilité et la réactivité de ses serveurs, la confiance qu’elle renouvelle régulièrement à 2CRSI en dit long sur la qualité des produits de celle-ci. Pour ses activités à l’étranger, qu’elle entend fortement développer, Blade a scellé en octobre 2019 un partenariat avec OVHcloud, qui dispose de data centers hors de l’Hexagone, en Amérique du Nord en particulier.


Technologie critique et processeur souverain

Kalray, une start-up issue du CEA fondée en 2008, apporte quant à elle sa technologie pour améliorer encore les performances des serveurs 2CRSI. Les deux sociétés ont ainsi associé leurs savoir-faire respectifs pour proposer un nouveau type de serveurs, à la fois évolutifs et personnalisables, capable de s’adapter aux besoins des clients. Ce tour de force est rendu possible par les solutions de Kalray, qui conçoit et développe des processeurs, des cartes électroniques et des suites logicielles. En l’occurrence, c’est sa carte d’accélération baptisée Konic™ qui permet de booster les performances des serveurs, ceux de 2CRSI en l’occurrence. Selon le président du directoire de Kalray, la solution de son entreprise « permet de consommer dix fois moins et d’être dix fois plus rapide qu’un processeur classique ». Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si le ministère de la Défense a investi dans cette entreprise, qu’elle considère comme critique, notamment parce qu’elle est en avance sur les technologies américaines et chinoises, en termes de miniaturisation des processeurs et de vitesse de calcul combinées à l’intelligence artificielle. Une jeune et prometteuse entreprise qui intéresse beaucoup les investisseurs américains et chinois, mais que les pouvoirs publics veulent garder en France.
Les pépites technologiques tricolores n’ont pas — encore ? — le prestige ni la puissance financière des grands groupes du luxe nationaux. Elles prouvent cependant que l’Hexagone n’est pas cantonné à la « vieille économie » et au luxe et qu’il est encore capable de développer des technologies d’avenir.