Remora, la solution développée par Segula Technologies, permet de stocker l’électricité durable grâce à de l’air comprimé. © Extrait de vidéo Ségula Technologies

Le problème, c’est le stockage. Si l’on sait très bien produire de l’électricité avec des éoliennes ou des panneaux solaires, on a toujours le plus grand mal à la stocker.
Pour rappel, le problème des énergies renouvelables est leur intermittence : quand il n’y a plus de vent ou de soleil, il n’y a plus de production d’énergie. Aujourd’hui, l’électricité produite est immédiatement utilisée. Pourtant, il serait plus intéressant de pouvoir la stocker quand la demande est basse afin de l’utiliser lorsque la production est faible et la demande forte. Et c’est précisément ce qu’on ne sait pas faire, ou presque…
La piste la plus féconde depuis quelque temps est le stockage sous forme d’hydrogène, via l’électrolyse de l’eau. Il s’agit ensuite, pour la mobilité en particulier, de retransformer cet hydrogène en électricité via une pile à combustible.
Mais ce n’est pas la seule piste…

Air comprimé et réservoirs sous-marins

L’entreprise Segula Technologies travaille en effet depuis plusieurs années sur le projet Remora, dont l’objectif est de stocker l’électricité renouvelable grâce à de l’air comprimé.
Pour ce faire, il « suffit », sur une plate-forme en mer, de récupérer l’électricité produite par des éoliennes offshore et d’en utiliser une petite proportion pour activer une pompe. Cette pompe aspire l’eau dans un piston, qui du coup comprime l’air qui s’y trouve.
Cet air comprimé est ensuite stocké dans des réservoirs sous-marins. Lorsque les éoliennes s’arrêtent faute de vent, l’air comprimé est relâché dans le(s) piston(s). Ce faisant, il chasse l’eau qui repasse dans la pompe qui, dans ce sens, fait office de turbine. Cette turbine reproduit alors de l’électricité, qui est injectée dans le réseau.
L’un des principaux points forts de cette technologie, brevetée par Segula Technologies, est qu’elle utilise un seul et même circuit pour stocker, puis déstocker. C’est le même équipement qui fonctionne dans un sens et dans l’autre, contrairement au stockage via l’hydrogène notamment.

Dans un sens, l’eau est pompée et permet de comprimer l’air présent dans les pistons. Dans l’autre, l’air chasse l’eau qui passe alors dans la pompe/turbine et (re)produit de l’électricité… © Extrait de vidéo Ségula Technologies

Fournir toute une ville en électricité

La quantité d’électricité stockée dépend du nombre d’éoliennes qui la produisent.
Selon ses promoteurs — Segula Technologies, Cetim, IMT Atlantique… —, une telle installation permettrait d’approvisionner une ville en électricité. Cela grâce uniquement à de l’air, sous forme comprimée, de brises ou de bourrasques. Et aussi à de solides infrastructures… Il s’agit d’un procédé qui n’émet pas le moindre gramme de C02, exception faite de ce qui nécessairement produit lors de la construction desdites infrastructures.
Si la mer permet d’accueillir les éoliennes et la plate-forme, d’abriter les réservoirs de stockage et de refroidir « le circuit », elle n’est pas à proprement utilisée pour produire de l’énergie.
C’est en revanche ce que souhaite faire une petite start-up bordelaise, qui développe sa propre technologie depuis plusieurs années.

Les mouvements de la mer comme source d’énergie

La technologie qu’elle a développée exploite en effet la houle de la mer pour produire de l’électricité. Pour ce faire, elle utilise elle aussi le principe de la colonne d’eau qui, dans un réservoir, chasse l’air qui s’y trouve. La différence est qu’une turbine, placée à la sortie de ce réservoir, produit directement de l’électricité. Il n’est donc pas, ici, question de stockage, mais de production.

Le protype Hace, installée près du pont de l’île de Ré depuis 2018 © Hace Wave Energy

Contrairement à d’autres projets qui reposent sur les fortes, voire très fortes houles pour produire de l’électricité, Hace mise au contraire sur les mouvements de l’eau d’amplitudes modestes, de l’ordre de 0,5 à 2,5 mètres. Un prototype de houlomotrice Hace est implanté près du pont de l’île de Ré depuis 2018. La start-up a reçu plusieurs prix internationaux, dont celui reçu dans le cadre du programme « Horizon 2020 Instrument PME », décerné par la Commission européenne, en 2019. Selon le fondateur de Hace, son procédé est le plus décarboné du marché et celui qui offre le prix le plus bas, de l’ordre de 2 centimes d’euros du Kwh.
Mais faute de financement, l’aventure semble être pour l’instant au point mort…
Segula Technologies est quant à elle en phase de recherche de partenaires industriels pour l’accompagner. Forte de ses 13 000 salariés — répartis dans 30 pays —, parmi lesquels nombre d’ingénieurs, elle a sans doute les reins plus solides pour faire face aux éventuels trous d’air. Et pour finalement concrétiser Remora.