Alors voici : la société Tricotage des Vosges fabrique les chaussettes Dim sous licence, ce jusqu’en juin 2009. C’est une plutôt bonne chose puisque, comme son nom l’indique, Tricotage des Vosges fabrique tous ces produits dans les Vosges, notamment ceux vendus sous ses marques, Bleu Forêt et Blue Sox. Jusqu’ici tout est clair, si ce n’est que ces chaussettes sont vendues sous la marque Dim, alors qu’il y a bien longtemps que les petites mains de cette entreprise ne fabriquent plus rien pour habiller leurs pieds. Ce sont là les mystères de la fabrication sous licence grâce auxquels ce n’est plus un produit ni un savoir-faire que l’on vend, mais un nom, une image de marque, du vent… Cette relative clarté se trouble quelque peu alors que Sara Lee, le propriétaire américain de Dim, vend l’entreprise à un autre Américain, le fonds Sun Capital Partners. Changement de propriétaire oblige, il s’agit de refaire les comptes, de procéder à des économies et, pour ce faire, de renégocier au plus bas tout ce qui peut l’être. Résultat, les chaussettes de marque Dim, qui sont donc fabriquées en France jusqu’en juin 2009, le seront à partir de cette date par une autre entreprise française, en l’occurrence Kindy. Aujourd’hui, celle-ci n’est plus qu’une marque elle même, puisque toute la fabrication se fait désormais en Roumanie. Pour résumer, la marque française Dim, qui appartient à des Américains, d’abord Sara Lee puis Sun Capital Partners, va faire fabriquer ses chaussettes par une autre marque française, Kindy, devenu de fait un fabricant roumain. Simple, clair, limpide, comme du jus de chaussettes… Reconnaissons cependant à Sun Capital Partners une réelle cohérence, puisque ce fonds vient de décider de transférer en Roumanie la production de la lingerie, jusque là assurée par Dim, à Autun (Saône-et-Loire), le berceau de l’entreprise. Si l’on suit jusqu’au bout la logique des stratèges de la finance internationale, Kindy devrait normalement hériter de cette nouvelle production. Mais comme on ne fabrique pas forcément un soutien-gorge comme une paire de chaussettes, Kindy devra à son tour la confier à une autre marque, d’origine française, allemande ou italienne, elle aussi devenue roumaine par la magie des délocalisations.
Dans tout ce bel édifice, il n’y a finalement qu’une seule chose que l’on puisse déplorer : c’est le manque évident d’imagination et de génie financier du propriétaire de Tricotage des Vosges, pourtant un ancien dirigeant de Dim. Ce chef d’entrerpise se contente en effet de fabriquer et de vendre ses propres produits. Et de faire vivre, accessoirement, 250 salariés.