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© Unilever

L’entreprise existait depuis 1703. C’est à cette date en effet que François Naigeon, maître-vinaigrier, l’a créée. C’est officiellement aujourd’hui, 15 juillet 2009, qu’elle met la clé sous la porte. Née à Dijon à l’initiative d’un artisan, Amora  meurt de la décision d’un géant de l’agroalimentaire, le Néerlandais Uniliver, son actuel propriétaire.
Entre-temps, Amora aura marqué le quotidien de chaque Français, adepte ou non de la moutarde de Dijon. La marque est en effet devenue le numéro 1 français dès 1939. Pendant près de trois cents ans, l’entreprise a tant bien que mal poursuivi sa croissance, au gré de quelques péripéties, propres à la vie des entreprises. Puis vinrent ce que l’on appelle désormais « les années fric ».
En 1980 en effet, Amora tombe dans le giron de BSN, qui deviendra plus tard Danone. En 1996, Danone rapproche Amora et Maille. Deux ans plus tard, le leader français de l’agroalimentaire cède l’ensemble à Paribas Affaires industrielles qui, en 2000, le revend à Unilever. Un géant de l’alimentaire — Alsa, Carte d’Or, Fruit d’Or, Ben & Jerry’s, Knorr, Magnum, Miko, Lipton… —, des produits d’entretien  — Omo, Cajoline, Cif, Sun, Skip — et des soins pour le corps — Signal, Axe, Dove, Timotei…— qui décide, en janvier dernier, que le site historique d’Amora, vieux de plus de trois siècles, n’avait plus de raison d’être.
Sur les 184 salariés du site, 86 rejoindront celui Chevigny-Saint-Sauveur, également en Côte-d’Or, où Unilever entend regrouper ses activités. Après la fermeture du site historique de Dijon, c’est celui d’Appoigny, dans l’Yonne, qui fermera ses portes, le 1er septembre prochain. Au total, 244 emplois seront supprimés. Et demain, qu’adviendra-t-il aux salariés de Chevigny-Saint-Sauveur, alors que la fabrication de la vinaigrette a déjà été délocalisée en République tchèque et celle du Ketchup en Pologne. Qu’arrivera-t-il à ceux d’Alsa et de Knorr en Alsace, de Lipton et de L’Eléphant à Marseille, où encore à ceux de Miko, à Saint-Dizier, où plus de 250 emplois ont déjà été supprimés l’an passé ?
Il n’y a en fait probablement pas lieu de s’alarmer, car si l’on en croit le site Internet du groupe, chez Unilever,  «Nous sommes conscients de nos responsabilités par rapport aux problématiques sociales et environnementales. Pour y répondre, nous travaillons en partenariat avec les gouvernements et les organisations locales. » (…) Notre ligne de conduite : adopter un comportement respectueux et responsable envers les personnes avec lesquelles nous travaillons, les communautés que nous touchons et l’environnement dans lequel nous évoluons. »
Nous voici donc rassurés. Ces sempiternelles bonnes intentions sont malheureusement affichées sur tous les sites Internet, sur tous les documents officiels des multinationales qui rationalisent, externalisent, délocalisent, regroupent, séparent, coupent, réorganisent, fusionnent, etc. Qui y croit encore aujourd’hui ?
D’ailleurs, toujours sur le site d’Unilever, on remarque que la rubrique « Actionnaires » est symbolisée par de lourdes pièces d’or ou d’argent empilées sur le plateau d’une balance. Et si l’on en juge par la position de ce même plateau par rapport à celui de la table en dessous, le second, celui qui n’apparaît même pas sur la photo, ne fait de toute évidence pas le poids. Mais cela ne veut probablement rien dire.