On prĂ©sente souvent les futurs emplois « durables » comme non dĂ©localisables. AncrĂ©s dans un territoire, ces emplois ne pourraient pas Ăªtre transfĂ©rĂ©s ailleurs. Logique. Parmi ces nouveaux mĂ©tiers qui devraient aider Ă rĂ©sorber le chĂ´mage hexagonal, il y a notamment ceux qui concernent la rĂ©novation de l’habitat. La mise aux normes environnementales des logements anciens est en effet un gisement potentiel important d’emplois. A une condition, toutefois : que ces emplois soient attribuĂ©s Ă de la main-d’Å“uvre locale, non pas Ă des travailleurs « mercenaires » importĂ©s pour tel ou tel chantier. Or, il suffit d’Ă©couter les ouvriers et d’observer les plaques minĂ©ralogiques de leurs vĂ©hicules garĂ©s Ă proximitĂ© des chantiers, pour comprendre qui la rĂ©alitĂ© n’est pas aussi simple. Pour s’en convaincre, inutile d’aller Ă Flamanville sur l’interminable chantier de l’EPR, ni mĂªme Ă Saint-Nazaire, oĂ¹ sont construits d’immenses paquebots. Non, il suffit de vĂ©rifier dans sa propre ville, dans son village, voire d’Ă©couter simplement les voix de ceux qui refont l’appartement d’Ă cĂ´té… En Savoie, par exemple, les tout nouveaux chalets d’un patelin perchĂ© Ă 1 600 mètres d’altitude sortent de terre grĂ¢ce au savoir-faire exclusif de quelques ouvriers polonais. Pas des hommes venus chercher une vie meilleure et installĂ©s dans l’Hexagone. Non, de la main-d’Å“uvre importĂ©e pour l’occasion par des donneurs d’ordres qui recherchent toujours les prix les plus bas. Des hommes qui ont parcouru des milliers de kilomètres, en camionnette, pour gagner les Alpes françaises.
Ce sont les bienfaits de la fameuse directive sur les services, jadis appelée directive Bolkenstein. Celle qui, en 2005, motiva la majorité des Français à voter « Non » lors du référendum sur la Constitution européenne. Par racisme envers le tout aussi fameux plombier polonais, prétendaient les partisans de la Constitution… Ce texte est depuis devenu effectif, discrètement, en Europe et en France…
Finalement, Ă quoi bon dĂ©localiser les emplois si ce sont les travailleurs qui se dĂ©localisent ? Vu le coĂ»t du travail en France, il y a en revanche peu de chances pour que ces emplois perdus dans l’Hexagone soient, un jour, compensĂ©s par d’autres gagnĂ©s Ă l’Ă©tranger. Pas en Suisse ni en Norvège en tout cas, qui ne sont pas membres de la CommunautĂ© europĂ©enne. Au Danemark, peut-Ăªtre…
on est d’accord
ce qui me gĂªnait, c’est la rĂ©fĂ©rence Ă la directive Bolkestein: le projet initial Ă©tait vraiment problĂ©matique car il prĂ©voyait la soumission au droit du pays de dĂ©part du prestataire. Le contexte lĂ©gal actuel est tout de mĂªme plus satisfaisant: est applicable le droit social du pays du lieu de la prestation
pour le reste, je ne suis pas dupe, il n’y a quasiment jamais de technicitĂ© non dĂ©tenue localement dans l’opĂ©ration
c’est dans la grande majoritĂ© des cas du dumping social importĂ© dans des secteurs (le BTP, la maintenance…) qui Ă©chappaient jusque lĂ Ă la mondialisation effrĂ©nĂ©e.
que faire? je ne sais pas trop. On ne peut, par principe interdire à une boite étrangères de tenter de décrocher des contrats en France (notamment pour celles ibériques actuellement, non?)
Taper sur les donneurs d’ordre ou les entreprises qui sous-traitent dès que le droit n’est pas respectĂ©?
Imposer une transparence des appels d’offre lorsque les contrats sont publiques?
@frenchjuan
Merci pour votre commentaire.
Vous avez raison, tout se passerait pour le mieux si chacun respectait les règles. Chacun sait que ce n’est pas toujours le cas. Quant aux entreprises transnationales dont vous parlez, je doute qu’elles gagnent des contrats aux dĂ©pens de leurs concurrentes locales en pratiquant des tarifs analogues, voire, rĂªvons un peu, supĂ©rieurs. Leur point fort est très probablement leur « moins-disances » sociale et salariale, car pour ce qui est des compĂ©tences non dĂ©tenues, pensez-vous sincèrement que les bĂ¢tisseurs polonais en ont que leurs homologues savoyards — ou portugais, italiens, roumains rĂ©sidant en France — n’ont pas pour construire un chalet ? Une chose est d’ouvrir une porte en espĂ©rant que tout le monde jouera le jeu ; une autre est de la laisser fermĂ©e en considĂ©rant que des profiteurs trouveront les moyens de tricher et finiront pas fausser totalement ce jeu. Ce qui est condamnable n’est pas, bien sĂ»r, le fait que des hommes essaient de gagner leur vie partant Ă des centaines ou des milliers de kilomètres de chez eux, mais que des employeurs fassent appel Ă eux pour faire des Ă©conomies en privant, du coup, leurs prestataires habituels de moyens de subsistance.
Bonsoir,
un peu lapidaire, non?
c’est surtout parce que le droit n’est pas appliquĂ© que les pratiques de dumping social « importé » existent. Si les textes, notamment celui-ci:
http://www.legifrance.gouv.fr/affichCode.do;jsessionid=E8EFFE08B76AB9618865928FA23C91C9.tpdjo13v_1?idSectionTA=LEGISCTA000006189477&cidTexte=LEGITEXT000006072050&dateTexte=20120701
l’Ă©taient, le monteur de chalets polonais, le paveur portugais ou le monteur de serres slovène n’interviendraient en France que dans les rares cas oĂ¹ leurs entreprises disposeraient de compĂ©tences non dĂ©tenues ici…
il faut noter que les ouvriers en question sont quasi systĂ©matiquement salariĂ©s d’entreprises Ă©trangères spĂ©cialisĂ©es dans la prestation transnationale, qui existent car des donneurs locaux font appel Ă eux en contournant la loi et rĂ©ciproquement
cordialement