© LFH

Il suffit de voir les  « peinteuses » travailler pour comprendre qu’un bol, une assiette, un bijou ou n’importe quelle autre création sortie de l’atelier HB Henriot n’a rien à voir avec les ersatz qui ont fait tant de mal à l’entreprise quimpéroise. Quel rapport peut-il y avoir en effet entre des décalcomanies simplement appliqués à la chaîne sur des pièce de faïence fabriquées en quantité industrielle en Asie, et une illustration unique faite au pinceau, sans droit à l’erreur, par une artiste sur un support calibré, pressé ou coulé, fignolé, cuit une première fois, émaillé, décoré, cuit une seconde fois puis contrôlé, tout cela en Bretagne ? Aucun, si ce n’est l’aspect général de l’objet, une fois fini. Car un bol HB Henriot peint à la main et made in France ressemble beaucoup à sa copie asiatique ; il faut avoir l’amour du travail bien fait, le respect des savoir-faire et la faculté de s’attacher aux objets pour accepter de payer 30 euros ce que l’on peut avoir pour 8. Et peu d’acheteurs sont aujourd’hui prêts à dépenser trois fois plus pour un bol breton, quand bien même celui-ci serait-il unique, à nul autre semblable.
Le résultat est qu’après avoir compté plusieurs centaines de salariés pendant sa splendeur, 150 il y a cinq ans, 50 l’année dernière, HB Henriot ne fait plus travailler aujourd’hui que 26 personnes…

Faïencerie HB Henriot, Quimper

© HB Henriot

La visite du vaste atelier de l’entreprise ressemble à présent à celle d’un musée, car même si des femmes et des hommes y travaillent encore, ils paraissent un peu perdus dans cet espace largement vide.
Le nouveau propriétaire, Breton de Douarnenez, veut relancer HB Henriot, valoriser le travail artistique, voire ouvrir l’atelier à des artistes contemporains pour qu’ils puissent travailler main dans la main avec les maîtres de la galette d’argile, de la « barbottine »*, du biscuit**, de l’émaillage, de la cuisson et de la peinture à main levée.
Car la production de la maison est loin de se limiter au célèbre bol « à oreilles », orné ou non du prénom de son propriétaire, avec au fond son petit Breton ou sa composition florale. HB Henriot édite en effet des services de table complets (du beurrier au plat à gâteau, en passant par la théière), des vases ou des lampes, sur lesquels se déclinent tout aussi bien les motifs classiques prisés par nos arrières-grands-mères que d’élégantes nouveautés, tel le délicat « Gwenn Ha Du », noir et blanc. Au rayon statues, HB Henriot fait également coexister l’ancien (groupe de danseurs bretons, statuettes de Vierge à l’Enfant, Saint-Anne, Saint-Yves…) et le moderne, innovant ou rééditant des créations Arts Déco des années 1920-1930. La faïencerie, ouverte en 1690, a en effet conservé dans ses greniers chacun des quelques milliers de moules créés au fil de son histoire. L’exigence est telle, chez HB Henriot, que les pièces jugées imparfaites sont vendues comme second choix au sein de la boutique attenante à l’atelier, que l’on peut visiter toute l’année.
Et il faut avoir un œil particulièrement exercé pour y déceler le moindre défaut. Elles sont en tout cas tout aussi belles, uniques et signées de la main même de la peintre — seules des femmes remplissent aujourd’hui cette fonction — que les pièces « bonnes pour le service », mais vendues 30% moins cher.

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